Les Songes du Crépuscule
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 Textes d'aout

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Aytan
Rêveur d'arbres et d'étoiles
Aytan


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MessageSujet: Textes d'aout   Textes d'aout EmptySam 25 Aoû 2007 - 10:39

Texte 1





Chacun des principaux princes était venu avec ces acolytes préférés, ce qui donnait à l’assistance des airs de ménagerie mythique. Le brouhaha dans lequel ils s’exprimaient ne donnait pas l’impression que les uns se souciait de l’avis des autres. Chacun avait sa raison d’être présent, son petit but personnel dans un plan plus global dont on ne savait plus vraiment qui tirait les ficelles.
Samaël pensif accoudé à son siège, Bélial déjà prêt à en découdre, Pursan, Asmodée, Shaïtan qui n’avait plus de roi des ténèbres que le titre.
« Morbide ». C’est le mot que David avait constamment à l’idée en défiant du regard chacun des convives. Un défilé de créatures zoomorphes et vêtues dans un registre des plus gothiques, aux gestuelles aussi forcées que dans un tableau baroque.
Zapan, Béelzéboub au cœur d’un nuage de mouches, Bael, Byleth, Iblis prétendant de façon humoristique que si Adam avait eu « autant de gueule » que leur invité, lui aussi se serait prosterné.
La décision fut prise sans réelle concertation, le simple fait d’avoir réunis ce cortège de personnalité démoniaque suffisait à justifier une action, histoire de ne pas s’être déplacé pour rien. Personne ne savait si la stratégie serait payante mais la plupart voulaient tenter le coup juste pour avoir l’opportunité, devenu si rare, de froisser quelques plumes d’anges.
Lucifer, Paymon, Léviathân reprochant à Béhémoth de s’être assis sur son siège, et enfin Immzelgom, glapissant de plaisir.
Malgré sa réussite face au Nephilim, Samaël ne semblait toujours pas convaincu à l’idée que l’Hybride puisse leur faire franchir à lui seul les neuf portes. Et pourtant…

*************************************************************


Cela faisait à peine quelques jours que David avait quitté son manoir mais déjà sa peau avait quitté sa traditionnelle teinte blafarde. Ces forces lui revenaient peu à peu et s’il lui manquait encore de l’assurance, heureusement le spectre semblait en avoir pour deux. Le spectre… David ne comprenait toujours pas comment son « moi » idéalisé, ce héros de papier, avait pu ainsi prendre vie et quitter la malle ou il était enfermé. Le simple fait d’y réfléchir lui donnait le vertige. Celui-ci prenait un malin plaisir à changer de forme dès que David commençait à s’accoutumer à sa présence. Afin de profiter des douceurs d’une auberge, l’être se matérialisa dans un costume impeccable et finement brodé. Sans laisser le temps à son maître de se manifester sur les bienfaits d’un minimum de discrétion, il entra et salua la compagnie d’un ton amical.

Tout au long de la soirée les regards portaient invariablement sur les deux compères, les discussions se faisaient chuchotement, contrastant avec les rires bruyants du spectre. Ce dernier tentait de divertir une dame de compagnie forte en chair par la narration de ces exploits imaginaires, sachant très bien que celle-ci aurait souri plus facilement à la vue de quelques pièces d’or. Après un profond soupir, l’apparition se tourna vers son créateur, avec une expression de satisfaction particulièrement inquiétante. Il se mit alors sans prévenir à proférer des insanités sur le compte des quelques gueux présents, choisissant spécifiquement les plus massifs. Le silence qui s’en suivit était des plus pesant. David se redressa d’un bond, tremblotant et le regard vide, mais trouva la force de d’empoigner son camarade par le bras, le suppliant de s’en tenir là et de quitter les lieux.

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Le Divin peut-il garder le silence en pareille circonstance ? Les humains ont depuis longtemps posé cette question quand la vie leur réservait moult difficultés, et cela leur a toujours été considéré comme justice. De la part d’un archange en revanche, l’interrogation faisait tâche d’huile. Comment un être aussi puissant pouvait-il raisonnablement douter des pouvoirs de son Créateur ? Et pourtant l’incertitude s’était installée, insidieusement, doucement, mais profondément. Il savait qu’il n’était pas le seul à s’interroger. Et si la question n’était pas tranchée rapidement, lui aussi allait suivre ces propres objectifs. Après tout, les démoniaques n’avaient jamais vraiment été inquiétés, non ? Les Apostats non plus. Ils menaient leurs barques depuis des temps indéfinis aux confins des différentes réalités, et ce des plus tranquillement. Le constat était amer : chaque fois qu’une rébellion éclatait, ses protagonistes imploraient la clémence du Tout-puissant et l’obtenaient. Parfois le pardon était total, parfois il se manifestait simplement sous la forme d’un délai pour prouver les accusations proférées.

L’archange ne souhaitait pas nécessairement contester les actes du Divin. Simplement accélérer un peu son jugement. Et une attaque massive des opposants ne saurait être une meilleure aubaine pour cela. Et si le Céleste laissait couler une fois de plus, l’autre cap saurait le récompenser pour son aide. Dans les deux cas Uriel(1) serait satisfait.

*************************************************************


– La Première porte. Imposante, comme toutes ses sœurs. Elles furent disposées ça et là par ceux qui avaient eu connaissance de la véritable structure de l’univers, comme des ponts entre les réalités. On ne peut passer d’un monde à l’autre qu’en franchissant l’une d’entre elles. Un seul endroit échappe à cette règle. Le monde originel. L’Eden. Son accès nécessite l’ouverture des neuf portes, simultanément. Seuls ceux en comprennent le complexe mécanisme peuvent les activer de la sorte. Ces êtres sont nommés les Passeurs.
Malphas expliquait à David les différents détails de la muraille de sa voix rauque, un corbeau juché dans un parfait immobilisme sur son épaule.
– Elles sont toutes reliées d’une façon ou d’une autre. Tu as en toi la somme des connaissances nécessaires pour être toi aussi un Passeur. Ton expérience dans la pyramide n’avait pour but que de faire remonter tous ces souvenirs à la surface. Et accessoirement t’amener ici.
– C’est l’une des neuf portes n’est-ce pas ?
– Il fallait que tu entres en contact avec l’une d’elles. Elles contiennent la même essence qui a permis ta création.
– Mais… Immzelgom n’est-il pas mon père ?
– C’est bien plus compliqué que ça. Il n’a servi que de « véhicule » tout comme ta mère humaine.
Samaël les interrompis.
– Tu es à demi humain, ces repères te sont indispensables mais ils sont pour moi la preuve que tu peux à tout instant faire preuve de faiblesse.

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Les clients entouraient à présent David et son compagnon mais celui-ci ne s’arrêtait pas de fanfaronner. Alors que David se sentait sur le point souiller ces vêtements ou de s’évanouir (ou les deux !) le spectre pris d’un coup une attitude sombre et déroutante. Pointant son piteux parent du doigt, il l’accusait de sorcellerie et plaidait sa cause comme étant manipulé par cet être abominable parfois surnommé « la peur sans nom ». Les hommes sur le point d’attaquer hésitèrent finalement à la simple évocation de l’affaire. Le spectre jurait et crachait sur la tête d’une hypothétique grand-mère que ses pouvoirs psychiques commençaient à s’estomper et qu’il venait dans ce lieu pour trouver une autre marionnette à torturer.

Brusquement il perdit sa consistance, et dans une imitation très réussie d’un appel à l’aide, il se diffusait devant l’air ébahi de son auditoire dans les narines et la bouche de David qui lâcha un violent hoquet. Sa tête tomba brusquement à la renverse, les yeux révulsés. Ces muscles contractés à bloc roulaient sous sa peau, elle-même parcouru par un picotement particulièrement désagréable. Puis, peu à peu, une douce chaleur envahissait son corps. L’instant, bien que de très courte durée, semblait durée une éternité. La peur cédait la place à la colère. Le goût salé de la transpiration à un besoin irrépressible de chair. L’envie de fuir à celle de se battre. Puis plus rien.

Le lendemain, vêtu de haillons recouverts de sang. David observait depuis une colline boisée les restes d’une auberge en contrebas. Des larmes coulaient le long de ces joues.
– Que m’avez-vous fait faire ?
– Vous ne vous rappelez donc de rien ?
– Uniquement des cris. Rien de concret.
– Bientôt vous n’aurez plus besoin de moi pour les entendre à nouveau.
David serrait les poings tandis que le spectre gloussait.
– Un certain François de Erstin est là. Dans les décombres. Il est venu pour vous. Habituez-vous à sa présence mon petit doigt me dit que vous aurez d’autres occasions de vous rencontrer.

*************************************************************


Les masses infernales se massaient dans ce qui aurait pu apparaître comme un véritable chaos. Les légions s’entremêlaient sous les ordres des officiers et des ducs. Le plan d’attaque était exagérément alambiqué mais il n’en fallait pas moins pour surprendre les chœurs angéliques.

Samaël les observaient en silence, sachant que ce spectacle impressionnant et inédit se déroulait alors en huit autres endroits, sous la direction de ses Princes. Pour la première fois, il s’autorisa un faible sourire. Non par conviction envers le plan d’Immzelgom mais plutôt par plaisir de troubler à nouveau le calme angélique qui régnait sur l’univers depuis trop longtemps. Une représentation du messie crucifié trônait en bonne place sur la garde de son épée. Après l’avoir longuement observé, il décida qu’avoir foi en un seul être, aussi puissant soit-il était vraiment trop risqué.


(1) Au début du christianisme, on assisté à l'émergence d'un culte dédié à Uriel sans qu'on sache précisément d'où il venait. L'Eglise l'a très rapidement interdit. En effet en absence de certitudes scripturales, trop grand était le risque de rendre un culte non pas à un ange mais à un démon (source : Wikipédia).


Dernière édition par le Sam 25 Aoû 2007 - 16:06, édité 1 fois
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MessageSujet: Re: Textes d'aout   Textes d'aout EmptySam 25 Aoû 2007 - 10:45

Texte 2





Maintes palabres auront inexorablement conduit à ce moment. Le Metatron regrettait seulement que ces discussions aient été menées au sein de chacune des parties, et non pas entre elles. Mais en même temps il mesurait combien il était utopique d’oser imaginer un quelconque dialogue entre des ennemis immémoriaux.
Le spectacle qui s’offrait à lui en contrebas lui donnait toutes les raisons de se maudire d’avoir retenu les flèches de ses troupes quelques temps avant, lorsque Samaël avait paru, flanqué de sa bête de foire.
Formidable. C’était le mot qui qualifiait le mieux la machine de guerre adverse, qui ajoutait chaque seconde de nouvelles têtes à son effectif.
Le surnombre était criant. Et les Séraphins n’étaient pas tranquilles. On l’aurait été à moins, confronté à plusieurs centaines de légions dont les membres ne vivaient que pour deux notions: le mal et le sacrifice de soi!
L’archange en chef donna une nouvelle fois à ses archers l’ordre de se préparer, en préambule du carnage à venir. Il scrutait en même temps les avant-postes au pied de la porte, à la recherche de l’hybride dont tout le monde parlait. Nulle trace de lui cependant. Le Metatron se dit que sa présence se ferait sentir tôt ou tard.


David n’avait guère eu le temps de se remettre de ses émotions après son court combat contre le Néphilim. La gigantesque trompe l’avait tiré de toute forme de repos par un son strident à réveiller les morts, ce qui était après tout le but avoué.
A présent il se trouvait sur le sentier de la guerre, au sens propre comme au figuré, à cheminer aux côtés d’un illustre inconnu qui n’avait pipé mot depuis leur départ.
Son père ne l’avait bien entendu pas accompagné, celui-ci arguant que son fils devait désormais poursuivre sa destinée « seul », et que toutes les réponses viendraient en temps et en heure. David commençait à ne plus savoir que faire de tous ces discours nébuleux, dont on prenait un malin plaisir à l’abreuver ponctuellement. Il comptait bien prendre les rênes des opérations le plus vite possible. La première porte serait ainsi son baptême du feu. Une manière de tester les capacités que les ténèbres lui prêtent.
Ses ambitieuses pensées furent interrompues par les premières paroles de son compagnon de voyage, qui d’après ce qu’il avait noté répondait au doux nom de Moloch.
- Halte! On arrive à la porte, cinq minutes d’arrêt, hurla le lieutenant à l’adresse des quelques milliers de démons qui les suivaient.
La voix gutturale avec laquelle il avait tonné ses ordres résonnait si fort que les troupes s’étaient arrêtées d’un seul homme. L’apostat se dit qu’il préférait bien davantage le silence chez cet être.
Ils atteignaient effectivement leur but. La porte se dressait au loin, fière, majestueuse, massive. Combien de temps mettrait-il pour la réduire à néant? Il allait sans doute bientôt le savoir.
Entre eux et la porte, le gros des forces des ténèbres étaient déjà rassemblées. Elles s’étalaient à perte de vue, évoquant les ingrédients d’une folie sans nom prête à trouver sur cette plaine un exutoire homérique. Le silence qui régnait était à la fois suffocant et déconcertant. Il ne manquait plus qu’un déclic pour que tout s’emballe, ce qu’une flèche réussit presque à faire.
Le projectile siffla et manqua de peu sa destination, éraflant la joue de David et allant se ficher dans l’épaule du malheureux soldat posté derrière lui. Le lycant leva les yeux et pointa son regard empli de haine en direction de son assaillant.
La réaction de Moloch ne se fit pas attendre, et une volée de flèches s’éleva en masse, obscurcissant les cieux. Le lieutenant avait donné l’ordre sans même avoir noté que d’autres légions devant lui pouvaient recevoir les dividendes de ce coup d’éclat sur le crâne.
L’ange tournoya dans le ciel, se jouant des flèches comme de vulgaires punaises. Gabriel savourait son entrée, juché sur son cheval, tout aussi immaculé que lui. Il avait choisi une monture car cela lui donnait un avantage certain dans les airs, mais à coup sur même le plus vif des destriers n’aurait pu anticiper ce qui allait suivre.
Durant le laps de temps qui avait suivi le premier projectile assassin, David était entré en une sorte de transe. Ses yeux devinrent noir d’ébène, un noir d’une profondeur abyssale. Moloch, envahi à l’image de tous les êtres environnants par l’effroi, recula de quelques pas.
Une aura de ténèbres s’était matérialisée autour de l’hybride, qui ne maîtrisait plus sa rage. Le halo pris de l’ampleur, prêt à éclater.
Le sourire en coin de l’ange Gabriel se figea, tout comme la plaine entière et les résidents de la porte. Le temps s’était arrêté. La noirceur de l’apostat éclata au grand jour.
Un sombre rayon fulgura vers l’ange et son cheval, qui se protégèrent tant bien que mal à l‘aide d‘un bouclier de lumière. Ce dernier ne fut efficace en rien. Le même condensé qui enveloppait David une seconde auparavant avala la lumière créée par le bouclier et s’empara de l’ange. Puis il gonfla et engloutit soudainement sa proie. Le calme assourdissant reprît ses droits.

Médusés, les Séraphins, qui observaient la scène lointaine, laissèrent peu à peu paraître des visages graves. Le bras droit du Metatron hasarda:
- Mais comment est-ce possible? Gabriel est-il…
- Je ne sais pas, répondit l’archange, mais s’il ne l’est pas, je ne sais pas où il se trouve.
- N’aurait-il pas dû se trouver avec les anges? Pourquoi est-il venu ici?
- Je n’ai pas les réponses à ces questions, Elemiah. Je ne comprends pas plus que toi ce qu’il se passe, mais je sais qu’il faut réagir sans plus attendre.
Il considéra une dernière fois la plaine, puis se tourna vers son assistance. Il cria:
- Archers! Bandez vos arcs…tirez!

Visiblement marqué, David reprît possession de ses sens suffisamment tôt pour rassurer Moloch. Lorsqu’au loin les premières vagues essuyèrent les premières salves, le lieutenant ordonna à ses troupes de charger. Ça commençait.


Samaël et Imzzelgom, côte à côte, ne perdaient pas une miette des débats qui se déroulaient sous leurs yeux. Une sorte de miroir d’onde leur permettait de suivre les évènements. Tous deux ne cachaient pas leur joie, et si le visage qu’affichait le maître des enfers n’exprimait qu’une joie surprise, celui d’Imzzelgom était assuré et confiant.
Samaël se refusait à l’admettre, mais leur « camp » venait de marquer un point important grâce à l’hybride. Jamais il n’aurait fait part de cette satisfaction à un être qu’il aimait détester, et ce même s’il s’était temporairement allié à lui. Rien que cette idée le répugnait.
Imzzelgom, qui lisait dans les pensées de son voisin comme dans un livre ouvert, appuya sur la corde sensible.
- Je vous avais bien dit que nous avions raison de mettre nos desseins en commun, mentait-il. Je pense vous avoir apporté, sous la forme à laquelle vous venez d’assister, la preuve de ma bonne foi. Imaginez ce que mon fils peut faire pour nous à présent.
Cela vous convainque-t-il?
- Je serais serein lorsque j’aurais la preuve que cet ange est bel et bien hors d’état de nuire. Et jusqu’alors je n’en ai pas eu la confirmation.
- Patience mon cher, patience.
Imzzelgom nota le frémissement imperceptible qui agita les ailes de Samaël. Il savait qu’il avait d’ores et déjà le dessus.


Rien ne semblait ralentir la course de David vers la porte. Les charmes employés par les anges et les flèches décochées par les troupes ennemies ne le touchaient plus, alors qu’autour démons de toute sorte tombaient comme des mouches. Les Séraphins, jusque là à l’abri, commençaient à descendre des remparts afin de défendre efficacement la porte. Las, Béhemoth s‘employait à nettoyer les abords de celle-ci. En compagnie de Moloch et d’autres lieutenants, il préparait le passage pour le lycant. La résistance s’amenuisait à mesure qu’ils rouaient les anges présents de coups.
David atteint la porte sans peine. Puis comme déconnecté du reste du combat, il posa une de ses mains velues sur le chambranle, enluminé et massif. La tête basse, il repartît dans une nouvelle transe qu’il ne semblait plus contrôler. Secoué de spasmes, il éructa un liquide verdâtre sur le bois ensorcelé.
La substance ainsi libérée s’étala progressivement et entreprit de faire fondre l’ensemble.

De chaque côté de la porte, on lisait à tantôt horreur, tantôt satisfaction carnassière. Le Metatron implorait silencieusement de l’aide.Viendrait-elle?


Au fin fond de l’abîme, l’ange s’éveilla. Rien autour sinon un épais brouillard et une sensation de vide absolu. Que s’était-il passé? Comment s’était-il retrouvé là sans avoir eu le temps de réaliser quoique ce soit? Gabriel hocha la tête de dépit. Pour la première fois, il se sentait désemparé.
Un autre membre du bien ne l’était en revanche pas du tout. Tout se déroulait selon son désir. Personne ne se doutait qu’il oeuvrait en douce contre les siens. Sa jubilation n’avait d’égale que sa félonie, qu’il aurait bien assez tôt le loisir d’employer à sa guise…
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MessageSujet: Re: Textes d'aout   Textes d'aout EmptySam 25 Aoû 2007 - 10:46

Texte 3




Ainsi pelotonné contre le grand corps inerte, David avait toutes les apparences d’un prédateur repu, satisfait par le carnage qu’il venait d’accomplir sous les yeux des autres légions.
Celles-ci campaient à distance respectable du Lycan, en demi-cercle au pied de la montagne tronquée. David n’avait pas repris sa forme humaine : le jeune homme rêveur et maladif qu’il avait été n’était qu’un lointain souvenir. Comme à Vitry, lors de sa première métamorphose, il était devenu la malebête. Sauf qu’il ne l’était plus seulement pour les hommes, fragiles êtres de chair de Gaïa, mais aussi pour tous les démoniaques, les sangs mêlés et même les Angelus, pétris d’orgueil et de certitudes.
Autour de lui, le vacarme des armées en marche cessait peu à peu, tel l’écho d’une musique lointaine et si douce à ses oreilles. D’un œil injecté de sang, David devinait au loin de grands démons écailleux, des succubes et des déchus regrouper la horde hurlante à coups de fouets dans les rangs. Le jeune Lycan esquissa un sourire satisfait de sa gueule monstrueuse. Demain, il les commanderait tous à la bataille, mais en attendant, il avait bien mérité un peu de repos. Lentement, il s’endormit.

« Un gros loup repu, voilà à quoi ressemble notre général à la veille de la plus grande guerre que l’on ait jamais imaginée depuis la chute ! s’exclama Bélial en promenant son regard de braise sur les alentours.
— Veux-tu seulement descendre en bas, juste pour voir à quel point il peut-être rapide ? ricana Béhémoth. »
Son rire guttural était ignoble. Le prince de la destruction fixa son interlocuteur, l’air narquois et passa sa grosse langue pustuleuse sur ses lèvres.
« Vaincre un géant est une chose, vaincre Dieu et ses anges en est une autre ! répondit Bélial d’un ton sec.
— Je crois que nous avons tous bien trop attendu ce moment ! dit Samaël, sortant soudain de son mutisme. »
Le Porteur de la Lumière arborait toujours son air taciturne, presque fataliste, qui ne l’avait pas quitté depuis. Assis sur une des chaises, Imzzelgom se contentait de sourire, sans rater une seule miette de leurs échanges. Cette heure de gloire n’était-elle pas avant tout la sienne ?

*


La nuit dans le monde des cendres laissa soudain la place à une aube mortelle. C’est au milieu du feu et de la fureur que David se réveilla en sursaut. A peine rassemblée, l’armée démoniaque venait d’être enfoncée par une attaque en règle venue du ciel.
Le jeune Lycan n’eut que le temps de se relever sous sa forme hybride pour recevoir l’assaut. Les Angelus venaient de se jeter sur eux dans un désordre sanglant. Les premiers rangs des légions de Dieu étaient passés au dessus de David sans le voir ; la masse du Nephilim l’ayant caché à leur vue. Les deux chérubins qui fondirent sur lui furent les premiers à tomber sous ses griffes. Le Divin s’était joué des démons comme des apostats : le siège de la Jérusalem Céleste s’était transformé en sortie victorieuse pour les défenseurs ! Les assaillants étaient devenus bêtes traquées…

Des cercles de sang se formèrent autour des plus grands combattants. Imzzelgom, qui venait de comprendre que Stonelink avait été détruit, distribuait la mort avec rage et habileté. David pouvait voir la forme immense, et bestiale de ce père tant attendu, se mouvant avec célérité, rendant coup sur coup. Il contemplait à présent sa vraie nature : un monstre de sauvagerie alliant rage primale et qualités de duelliste.
Les déflagrations agitaient la terre, le feu s’opposait au feu. David frappait, tranchait, la vision troublée par un voile sanglant. Il pouvait voir des formes monstrueuses, celles des autres maudits, se tordre et se consumer sous les flammes purificatrices. Uriel ouvrait de larges brèches dans les rangs à l’aide de son souffle divin. Mais rapidement, la horde se réorganisait. Les Angelus avaient provoqué dégâts et confusion par leur attaque surprise, ils semblaient maintenant bien peu face au nombre des damnés.
Gabriel et Michaël combattaient dos à dos, jetant des regards inquiets dans toutes les directions. Une cohorte réduite s’était regroupée auprès des deux grands guerriers du Paradis mais la plupart des Angelus s’étaient retrouvés dispersés, englués dans la multitude de la horde. Impuissants, les archanges ne purent qu’assister à la perte de plusieurs guerriers parmi les plus vertueux. Ici les succubes jouaient de leurs griffes acérées sur les corps des purs, là, tout un groupe d’Angelus était submergé par des ombres hurlantes dégoulinantes de sang, les âmes damnées devenues soldats de Samaël.

Les trompettes de l’apocalypse retentirent sur le champ de bataille, provoquant un frisson éphémère, mais saisissant, parmi tous les combattants.
Les anges qui avaient réussi à se regrouper reculèrent d’un mouvement unanime vers la première porte. Les archanges hurlaient leurs ordres, organisant le repli sur le feu protecteur des éclairs. Ils avaient pêché par orgueil et se préparaient à en payer le prix. En voyant toutes ces créatures rassemblées, prêtes à porter le coup de grâce, Michaël trembla de fureur. Une éternité de mensonges et d’interdits avait fait grossir les rangs des damnés. A présent, les purs allaient être submergés et la Cité de Dieu souillée, livrée à la destruction.
« Nous sommes légions ! »
Le cri retentit parmi les démoniaques : sous forme de chants, de râles de feulements bestiaux. La horde s’élança pour la charge finale.

*


Le choc avait été terrible. Mais bêtes de l’enfer et apostats s’étaient heurtés au fer à la juste détermination de l’armée divine. Depuis les murailles ceignant la grande porte, les flèches tirées par les séraphins avaient brisé la puissance de la charge.
David se retrouvait perdu, poussé dans une mêlée confuse dont il ne faisait que subir la bousculade. Sa rage redoubla, ses griffes et crocs taillaient des chemins de sang. Lui qui avait courtisé l’invincibilité et le pouvoir suprême se retrouvait débordé. Il n’avait aucun contrôle sur les forces qu’on lui avait destinées. Il frappait maintenant sans distinction, tranchant les bénis comme les damnés, alliés comme ennemis. Ses yeux de loup lui permettaient de voir leurs âmes, semblables à de petits feux follets, trembloter et s’éteindre, fauchés par les attaques. Aujourd’hui, les limbes allaient accueillir un grand nombre d’esprits égarés.

Mais David ignora bientôt la bataille et son enjeu. Gabriel lui avait volé son rêve de puissance. Il se fraya un passage pour aller à sa rencontre.
C’est là qu’il le vit, l’épée levée, un sourire sévère se dessinant sur son visage de statue. La stratégie meurtrière de l’archange avait finalement payé et il se réjouissait déjà de cette victoire annoncée. Bientôt, les damnés échoueraient et se disperseraient en bandes rivales avant de s’enfoncer dans l’abîme d’où ils étaient sortis.
Gabriel prit son envol et David bondit à sa suite, traversant la marée hurlante des combattants. Le jeune Lycan comprit lorsqu’il vit l’archange fondre en direction d’un maelstrom d’énergie crépitante : Béhémoth distribuait la mort. Ses larges paumes ouvertes projetaient des colonnes de lumière rouge et des Angelus tombaient sous des décharges de puissance brute. Le démon ventripotent ricanait, se tenant au centre d’un véritable astre écarlate.
David voulut courir, intercepter Gabriel en pleine charge. Mais soudain, il vit la face verruqueuse de Béhémoth se tourner vers lui et lui adresser un sinistre clin d’œil.
David sentit ses os se briser lorsqu’une rafale d’énergie le frappa en pleine poitrine. Sa vue se brouilla. Des exclamations jacassantes retentirent quand le Lycan effectua un vol plané, éjecté comme un pantin désarticulé, avant de passer au travers de la porte.

*


En rouvrant les yeux, David pensa tout d’abord être dans les limbes car seule une blanche clarté s’offrait à eux. Mais sa douleur le ramena bien vite à la réalité. Si son corps souffrait, c’est qu’il existait toujours. Un goût de sang caractéristique lui avait d’ailleurs envahi la bouche. Il hurla en pensant que tous ses membres étaient brisés et qu’il allait mourir là, affamé, comme un animal estropié.

Puis le décor se révéla enfin à lui. David était seul, adossé à un mur ; seul au milieu d’une ruelle étrange. Il reconnut immédiatement le ciel de Gaïa, quelques constellations lui étaient familières, mais pas l’endroit où il se trouvait. Routes et bâtiments étaient faits d’une substance grisâtre, uniforme, et le métal corrodé avait remplacé les poutres de bois. Rien à voir avec les pavés et le torchis de Vitry. Une inscription en latin, peinte d’une main malhabile sur le béton, l’informa toutefois que des humains étaient passés par ici : « Le seigneur est notre berger », disait le graffiti.
David bondit, comme dans un réflexe de chasseur. Puis il cracha un filet de bave et de sang. Son corps, constellé de multiples brûlures, lui faisait mal, sa jambe le lançait de douleurs atroces, mais il était entier. Comment Béhémoth avait-il pu être assez naïf pour essayer de le tuer ? Il paierait bientôt cette trahison, lui et ses partisans, et peu importe si David devait traverser la Terre entière dans cet état pour les retrouver. Il fit quelques pas, la démarche chancelante, quand l’odeur du sang vint éveiller ses sens encore endoloris. Non loin de lui, la chandelle vacillante d’une âme luisait faiblement. David s’en approcha et ce qu’il découvrit le figea sur place…

Une jeune fille, pâle et frêle, était étendue, respirant avec difficulté. Une de ses mains était crispée sur une dague et l’autre sur son ventre ensanglanté. David remarqua que celui-ci avait du littéralement être labouré par une arme redoutable car on aurait dit que la fille avait encaissé plusieurs coups de couteau. Il se dit qu’elle était à l’article de la mort.
Près d’elle gisait, face contre terre, le corps d’un homme revêtu d’étranges tissus tachetés de noir et de gris, comme pour se camoufler. Son dossard, déchiré de nombreux impacts de lame, était décoré d’une grande croix blanche : un uniforme, semblable à celui des croisés mais à la fois si différent !
David détailla la fille qui tremblait de tout son être, lui adressant un regard effrayé autant que fasciné. Elle portait les restes d’une robe noire à jupons et un pentagramme d’argent ornait, en médaillon, son cou délicat. Ses cheveux bouclés avaient été teints pour arborer une couleur rousse vive. Tout en elle indiquait une volonté de se rattacher aux anciennes croyances. Ses lèvres exsangues remuaient faiblement, mais malgré son ouïe délicate, le Lycan ne comprenait pas ses mots : la jeune femme en noir parlait un anglais trop différent de celui qu’il connaissait par ses lectures. Puis il prit tout à coup conscience de ce que lui permettait ses nouveaux pouvoirs de garou, durement acquis au cours de l’épreuve de la pyramide.
David plongea vers la mourante et celle-ci hurla lorsque ses mâchoires se verrouillèrent sur son ventre blessé. Les images mentales défilèrent dans la tête du Lycan, bribes de souvenirs et de connaissance.
La guerre pour les portes avait déséquilibré les pouvoirs régissant les différents univers. Partout, sur Terre comme ailleurs, les croyants et les prophètes s’étaient relevés pour annoncer au monde le jour du jugement dernier. Les hommes avaient eu la révélation de l’existence des anges, des démons et des autres êtres. Partout, les factions armées étaient entrées en guerre, provoquant désordre et anarchie. Les anciennes frontières et les enjeux diplomatiques n’avaient plus lieu d’être : la grande bataille pour les âmes avait refaçonné la Terre. Beaucoup avait rallié les forces divines, conscients à présent de la réalité du Créateur, ou par peur de l’Enfer. L’Amérique puritaine, présidée maintenant par le révérend Seacker, s’était lancée dans la croisade contre les impies avec toutes ses forces restantes. Bien d’autres humains avaient refusé de choisir entre des dogmes si inhumains et le mal absolu. La fille en noir, Trish, était de ceux-là. David avait mordu la chair d’une apostate pour s’approprier sa connaissance. Mais il savait qu’elle n’était pas la seule.

« Tu vas pouvoir te relever et me servir, servante de l’apostasie ! gronda David avec le langage nouveau qu’il venait d’assimiler. Mes crocs t’ont apporté le bienfait de la contagion. Tu vas aller mieux d’ici peu et bientôt, tu seras comme ceux de ma race. Je te laisse quelques minutes, le temps que tu reprennes tes forces, après quoi, il faudra quitter ces lieux, et vite ! »

David fouilla la chair du soldat mort et en arracha un quartier de viande sanglant qu’il posa dans la main de Trish. Elle esquissa soudain un sourire qui valait tous les remerciements. Ce soir, elle ne rejoindrait pas l’enfer mais serait la première combattante de la nouvelle armée du maître tant annoncé dans les prophéties. Sur Terre comme dans les autres mondes, la guerre ne faisait que commencer !
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