Les Songes du Crépuscule
Vous souhaitez réagir à ce message ? Créez un compte en quelques clics ou connectez-vous pour continuer.



 
AccueilAccueil  RechercherRechercher  Dernières imagesDernières images  S'enregistrerS'enregistrer  Connexion  
Le deal à ne pas rater :
Display Star Wars Unlimited Ombres de la Galaxie : où l’acheter ?
Voir le deal

 

 Textes de Juin

Aller en bas 
AuteurMessage
Aytan
Rêveur d'arbres et d'étoiles
Aytan


Nombre de messages : 773
Age : 38
Date d'inscription : 26/12/2005

Textes de Juin Empty
MessageSujet: Textes de Juin   Textes de Juin EmptyMar 26 Juin 2007 - 9:56

Texte 1


Ainsi engoncé dans son trône de cuivre, l’être démoniaque ressemblait à une idole grotesque ; ses replis graisseux épousaient le moindre creux de son siège. Un sourire lubrique naquit pourtant sur sa face verruqueuse, le tirant de son immobilité. La superbe créature qui s’affairait entre ses jambes gémit faiblement tout en ondulant d’avant en arrière.

Une lueur intense envahit soudain la salle, éclairant jusqu’à son moindre recoin. Une voix puissante retentit, qui couvrit les cris d’agonie lointains :
— Tu es encore en train de t’amuser à mes frais ! Pendant que tu te vautres dans le luxe que je t’ai offert, l’hybride progresse ! Il vient de s’éveiller à la puissance par le pouvoir de Chamsin. Tu dois réagir, ou mérites-tu encore de figurer à mes côtés !
— Samaël, tu pourrais quand même frapper avant d’entrer ! ricana Béhémoth. Je suis ton ami Samaël, tu le sais ! Personne en ce monde n’est plus reconnaissant que moi envers toi. Je vais t’en apprendre une bien bonne au sujet du bâtard : il a déjà mis en échec le grand sénile et ses apôtres par ma seule action. Il a suffit d’attendre un peu que Milena, cette sacrée catin, le guide vers la grande pyramide pour que les archanges ne le fuient comme la peste, et tout cela ! Et à présent, je vais profiter de cette nouvelle puissance pour lui porter le coup de grâce, car toute créature qui mue est vulnérable.
— Mais qu’attends-tu donc, notre perte à tous ?
— Non ! Juste le bon moment !...
Béhémoth ponctua ces paroles d’un horrible cri de jouissance. Puis il repoussa impitoyablement sa concubine de sa grosse patte griffue.
— …Vois tu, dit-il en reprenant son souffle, nos adversaires me croient dénué de subtilité ! C’est là leur plus grave erreur, je feins seulement de les laisser faire pour ne frapper qu’au moment opportun.
Le démon obèse fixa son interlocuteur d’un regard de braise, le même que lors de la grande révolte contre Dieu. Et soudain Samaël se tut.
— Je vais te faire un grand plaisir, Samaël, en tant qu’ami. Je vais te permettre d’assister à ton triomphe par ma seule action, et aux premières loges ! Installe-toi bien.

Béhémoth claqua ses doigts potelés et aussitôt, d’autres succubes sortirent en rampant de sous les couvertures pour contenter leur grand maître. Le monstre jaillit de son fauteuil avec une étonnante célérité. Nu et transpirant sur le balcon de sa suite, il leva un bras ophidien vers le ciel de sang, chargé de traînées enflammées et de nuages ardents.
— J’espère que tu as bien profité de ce petit moment de coït, jeune David, fils du faible Imzzelgom. Car à présent, tu vas connaître la vraie force, une puissance incalculable capable de frapper à travers les mondes et l’éternité ! Où que tu sois, subit la douleur de mon poing !
Un fracas de tonnerre suivit ces paroles. Une colonne de lumière rouge s’éleva rapidement dans la voûte, déchirant La réalité sur son passage…
*

David était agenouillé, plaqué au sol par toute la puissance des êtres qu’il venait de réveiller. Ses sens saturés ne percevaient plus rien en dehors des plaintes stridentes. Tout son corps n’était plus que le conducteur d’une gamme infinie de sensations. En ouvrant ses yeux embrumés, il lui semblait voir la flamme, toute proche de l’âme de Milena et celles, plus éloignée, des bédouins au milieu du désert.
— Une infinité de mondes pour une infinité de possibilités ! hurlaient les voix dans la pyramide.
Un moment, le jeune Lycan se releva comme pour s’extraire de leur étreinte invisible. Mais alors qu’il commençait à sentir à nouveau ses muscles, sa vision se brouilla. Une déferlante d’énergie venait de toucher l’édifice en crevant le plafond, comme s’il s’était agi d’un vulgaire toit de chaume. Mais David avait déjà anticipé l’attaque, ses sens surnaturels étaient à présent décuplés. Son bond lui fit toucher les parois du tourbillon de lumière qu’il avait jusque là soigneusement évitées.

— David ! hurla Milena en sentant disparaître de ce monde la chaleur de son protégé.
*

Lorsqu’il reprit ses esprits, toute douleur avait disparu. Il n’était plus l’objet de forces cherchant à s’emparer de lui. Le silence était presque total, mis à part les chants de quelques oiseaux lointains. Une fraîcheur agréable régnait en cet endroit…
Mais quel endroit ? Le jeune Lycan se releva aussitôt, poussant un cri étouffé, comme s’il venait de sortir d’un mauvais rêve. Un moment, les rayons du soleil éclairèrent doucement son visage. Aucun doute, il se trouvait dans une pyramide, bien que celle-ci fut minuscule, pas plus de six pas de côté à chaque mur. Une ouverture grossière avait été aménagée à la pioche, juste en face de lui, et il pouvait deviner au dehors le paysage d’une plaine aride, balayée par les vents. La lumière provenait de trous perçant le plafond.
David remarqua avec stupeur qu’une croix chrétienne trônait au fond de la pièce, surplombant un autel de bois noir décoré de rubans, statuettes autres colifichets. Ici, l’empreinte du démiurge se mêlait inextricablement à d’autres symboles plus proches des anciennes croyances. David commença par se frotter les yeux puis il se rendit enfin compte de l’évidence qu’il ne voulait toujours pas croire : il n’avait pas changé de place ! La pyramide était toujours la même… Toutefois, elle s’était suffisamment enfoncée dans le sol pour que n’en émerge que le sommet, seul témoin d’un gigantisme passé. Les pierres étaient usées, décrépies, perforées par endroits d’étranges impacts.

David fit quelques pas en direction de la nouvelle porte. Le sol en terre battue attestait de nombreux passages et de l’empreinte du temps. Il apparaissait clair que la vraie question, pour lui, ne devait pas être« où suis-je ? » mais « quand suis-je ? »…
Sa sortie provoqua quelques frôlements et bruits de courses. Immédiatement, le jeune prédateur ressentit la présence d’humains en ces lieux. Il pouvait apercevoir la flamme de leurs âmes tremblotant faiblement dans l’autre monde. Il était évident que les cahutes qui s’offraient maintenant à sa vue étaient encore habitées. David se retourna pour mieux voir le sommet de la pyramide qui formait le centre d’un village indigène, ou du moins ce qu’il en restait. La plupart des « maisons » n’étaient plus que des amas de planches et de tôles, squelettes moribonds regroupés autour de ce singulier monument. David détailla la façade blanchie par le soleil de plomb, dépourvue de son revêtement d’autrefois. De nombreux graffitis en langue arabe la recouvrait, mais il reconnut tout de même un mot français qu’il connaissait de par ses lectures : « démocratie », barbouillé d’une peinture couleur de sang…

C’est alors qu’il les vit sortir et venir vers lui : des hommes, des femmes, des enfants, tous à la peau noire et aux traits mélangés, tous maigres et faméliques. Leurs tenues ressemblaient à celles des bédouins bien que certains portaient dans leurs dos d’étranges armes de métal terne, « peut-être des arbalètes locales » se dit-il. Mais ce qui frappa le plus le Lycan, c’étaient les regards sombres des humains ; certains éteints par les pleurs, d’autres brillant d’une lueur de défi. Rapidement, un vieillard s’avança pour l’interpeller dans une langue inconnue. Il agitait le poing, visiblement nerveux. David voulut répondre en bredouilla quelques mots, des salutations. Puis il se rendit compte qu’il n’arriverait pas à se faire comprendre de ce peuple lointain avec les langages qu’il connaissait. Il recula, mal à l’aise, et la petite foule se rapprocha. Pour le coup, il avait presque honte d’être tombé ici. Mais une femme sortit des rangs et posa doucement la main sur l’épaule de l’ancien en geste d’apaisement. David remarqua immédiatement son visage fantastique et harmonieux, ressortant de ses voiles légers. Un visage d’ange constellé de petites scarifications.
— Tu viens sans doute de très loin, créature des ombres. N’aies crainte et sois le bienvenu parmi notre communauté !
La voix, féminine et rassurante, avait résonné dans la tête du Lycan. Un pont invisible venait de s’installer entre les âmes de David et de la femme noire. Se remettant à peine de sa surprise, il lui répondit, articulant des mots que lui seul semblait comprendre, sans pour autant les avoir prononcé auparavant :
— Qui êtes vous ? Et comment faîtes vous cela ?
— Je m’appelle Naïma, et comme beaucoup des miens, je suis animiste. Mon maître m’a suffisamment initiée pour me permettre de percevoir et de communiquer avec ceux de l’autre monde.
— Une sorcière ? répondit David, mais il se sentit stupide d’avoir prononcé ce dernier terme, si négatif dans sa propre culture.
— Oui, sorcière je suis puisque je rends le culte à nos esprits et connaît les plantes et les bêtes.
David restait là, planté, sidéré par une telle rencontre. Il avait devant lui une démonstration évidente de pouvoirs païens. Un grondement étrange parcourut le ciel et interrompit leur échange surnaturel. Les villageois se dispersèrent, comme résignés, mais alors que David leva les yeux, une peur indicible s’empara de lui, provoquant tremblements et nausées à travers son corps. Rien ne l’avait préparé à la silhouette fuselée et brillante qu’il venait de voir fendre les nuages.
— Un MIG ! Les hommes de Khartoum savent déjà que nous sommes là. Viens avec moi, il nous faudra certainement partir demain à la première heure, dit simplement Naïma.
*

La hutte de Naïma était un endroit fascinant, envahi de parfums et des instruments de son art magique. Las de toutes ses dernières expériences et encore abasourdi par le choc qu’il venait de subir, David ne tarda pas à s’allonger sur le côté. La pauvre natte de paille que lui proposa la sorcière lui parut à ses yeux le plus confortable des lits et il put enfin savourer l’hospitalité d’un foyer. D’ailleurs, la nuit, dehors, était horriblement glaciale, à la mesure du soleil de Nubie. La Nubie, il avait lu de nombreuses histoires à propos de ces terres de sombres légendes de pharaons noirs, de Blemmyes sans têtes et d’hommes-chiens.
Par Naïma, il sut que ce répit serait de courte durée : elle et son peuple faisaient partie d’une culture haïe, et traquée sans pitié par le régime des religieux, des serviteurs autoproclamés d’Allah. Patiemment, elle lui expliqua l’histoire de son pays, son savoir ancestral de l’autre monde et de ses passages, mais aussi ses peurs. La femme semblait pourtant bien calme face à de telles horreurs. Elle était forte et savante, il se sentait ignorant et pleurnichard à côté d’elle. La « voix des esprits » qu’elle parvenait à ouvrir avec lui, ou son « animal totem » le rassurait profondément.
Tant et si bien que lorsqu’elle quitta ses voiles pour se pelotonner contre lui, il ne résista pas longtemps à sa main douce caressant son corps tendu. Il était évident que Naïma était en manque d’homme depuis que les miliciens avaient exécuté celui qu’elle avait épousé. Peut-être aussi la peau blanche de David exerçait sur elle une attraction particulière. Le jeune homme, qui n’avait jamais dormi avec personne depuis sa plus tendre enfance, se laissa ainsi aller aux plaisirs de ce corps chaud et souple. Un rayon de lune rousse, perçant à travers une ouverture éclaira leur étreinte…
*
— Réveille-toi, Les chasseurs sont sur toi ! hurla la face camarde du spectre, penchée sur lui.
David poussa un horrible hoquet en se levant en sursaut. Nu en nage, il se précipita au dehors. La nuit silencieuse avait soudain cédé la place à un brasier. Des hommes couraient en tout sens, échangeant des tirs avec des ennemis invisibles. Leurs armes produisaient un son que David ne connaissait pas et qui le faisait trembler. Mais sa peur fut de courte durée car déjà la transformation s’opérait en lui. Il n’avait pas rêvé, le spectre se trouvait là, flottant au dessus des toits effondrés. Sa silhouette lui apparaissait au travers du filtre rouge de ses yeux de Lycan.
— Il est temps pour toi de combattre ! gloussa la créature.
David se retourna aussitôt en entendant les cris de dromadaires lancés à la charge. Sans doute les miliciens n’avaient pas vu la chose monstrueuse que dissimulaient les ténèbre de la nuit et furent fauchés par ses griffes avant de comprendre ce qui se passait.

La rage primale du Lycan lui fit oublier ses nouvelles terreurs. C’est sans hésitation qu’il engagea la lutte contre une monstruosité métallique, sorte d’énorme tortue rampante portant des bouche à feu béante sur le dos. Une grêle de projectiles acérés plut sur son corps endolori dans un vacarme de fin du monde. Mais David ignora la morsure du fer brûlant pour se jeter l’horreur. Les serres du Lycan déchiraient la coque avec sauvagerie, arrachant des plaques de métal comme s’il s’était agi de cuir tendre. A sa grande surprise, des hommes se trouvaient à l’intérieur, engoncés dans le ventre de la créature et incapables de fuir. Les chasseurs d’hommes du Darfour hurlèrent comme des enfants lorsque leur sang se répandit sur l’épave du tank.

Au dessus du carnage brillait la plus belle et la plus grande des lunes rousses, véritable zénith de la nuit…


Dernière édition par le Mar 26 Juin 2007 - 19:06, édité 1 fois
Revenir en haut Aller en bas
https://songes-du-crepuscule.1fr1.net/
Aytan
Rêveur d'arbres et d'étoiles
Aytan


Nombre de messages : 773
Age : 38
Date d'inscription : 26/12/2005

Textes de Juin Empty
MessageSujet: Re: Textes de Juin   Textes de Juin EmptyMar 26 Juin 2007 - 9:57

Texte 2




Milena s’accroupit et attrapa une poignée de sable qu’elle fit glisser d’une main à l’autre entre ses doigts. Maintenant le reste ne dépendait plus d’elle. Plus rien ne devait la concerner, encore que son zèle dernier et ses initiatives posaient une certaine dose de risque sur ses épaules. Une seconde poignée de sable se faufila entre ses doigts. Le dernier s’échappa, scellant le sablier de ses pensées. le jour naissant donnait un peu de relief aux dunes. Elle frappa ses mains l’une contre l’autre et se releva. Lentement, elle réajusta son chèche dont l’une des extrémités pendait négligemment sur sa poitrine. Le tissu, enroulé autour de son visage, ne laissait plus voir que le regard un peu perdu, brusquement délavé, de la jeune femme.
Le vent se levait. Un vent en aucun point comparable à ces derniers jours, un vent simple, délicat, seulement assez sournois pour aider le sable dans son appétit sur le monde vivant. Milena jeta son sac sur le dos d’un chameau. Un bédouin s’approcha.
- Nous ne l’attendons pas ?
- Il n’a plus besoin de nous… - elle leva les yeux au ciel - … et nous devons partir d’ici sans traîner.
Elle serra la sangle de l’acharnement sur le dos de la bête.
- Allez ! On lève le camp !

la caravane nomade reprit sa route dans les râles graves des bêtes à bosses. L’aube finissait son entrée et comme des siècles durant, les hommes du désert étaient seuls à l’accompagner sur scène. Les dunes demeuraient muettes. Les bédouins avançaient, attentifs à la moindre trace de vie. En vain. Le silence écrasait de son emprise le monde du désert, avalant jusqu’aux bruits de pas dans le sable.
Et le vent changea.
Sa douceur se mua en agression. Soufflant, tournoyant, les rafales et bourrasques soulevaient le sable, enveloppant, emprisonnant la caravane dans un couloir aux teintes ocre et beige. Le soleil ne filtra bientôt que par quelques minces interstices. Les animaux s’agitaient et les chameliers avaient le plus grand mal à les maintenir en file indienne. Une lueur. Une lame se planta dans une dune, entre les pattes du premier des chameaux. L’animal rua, éparpillant le paquetage fixé sur son dos. La caravane s’arrêta.
Une silhouette se détacha à travers le sable.
Longue et élancée, la silhouette marchait vers eux avec grâce dans un déhanchement décalé. Elle saisit la lame et la retira du sable. Le vent tomba brusquement, laissant chaque grain de ce brouillard s’effondrer sur le sol. la silhouette découverte se tourna vers les chameliers. Le soleil revenu reflétait sur une toge blanche serrée, ça et là en travers du torse, par des sangles de cuir immaculées. La féminité de son visage taillé avec finesse et élégance, de sa longue chevelure noir ébène courrant jusqu’à un bassin sculpté par quelconque esthète de la Renaissance, contrastaient avec l’absence flagrante de poitrine, et cette force lourde et bestiale qui venait d’envahir le désert. Les douze hommes qui l’accompagnaient, serrés dans la même toge, n’opposaient, eux, aucun doute sur leur genre biologique.
Bousculant plusieurs de ses compagnons, se faufilant entre les chameaux revenus à la raison, Milena atteint la tête de la caravane.
L’inconnue fit voleter son sabre dans les airs autour de lui. Elle glissa un regard sur le tranchant et l’essuya le tranchant sur le tissu de sa manche.
- Sachons prendre soin de nos outils, le sable peut être le théâtre de tant de tourments et de déchirure.
Ses deux grands clairs se posèrent sur Milena.
- Vous voilà, Belle demoiselle du désert. Je viens à vous pour une simple question. Comment en sommes nous arrivés là ?
Milena resta immobile, suivant du regard le plus petit mouvement de cette apparition armée.
- Délicate Milena, pouvez-vous m’éclairer sur ce qui a permis à la cible de s’accomplir. Vos ordres semblaient clairs. Le mener là où il devait être en prenant soin de rien déclencher avant que le divin ne le juge nécessaire.
Le vent souffla le temps d’une respiration.
Milena ravala ses appréhensions pour plonger dans une touche d’insolence.
- Les ordres que vous m’avez insufflés étaient et restent on ne peut plus clairs Chère Michel. Le mener ici, en vie. et c’est sur ce dernier point de détail que j’ai eu à faire preuve, je l’avoue ma foi, d’un certain zèle. Malheureux concours de circonstances…
Inspiration.
- et je n’aurais jamais eu besoin de lui donner les moyens de se défendre si à Vitry, ‘les fous d’en haut’ n’avaient pas envoyé l’un de vos collègues archanges emplumés pour tenter de régler l’affaire sans réfléchir…
l’archange baissa les yeux.
- un bien malheureux concours de circonstances en effet

Milena se tourna vers les bédouins. L’expression de son visage, le geste de sa main gauche ne laissaient aucun doute. Elle fait signe de rassembler les bêtes et de reculer. Le chef nomade tourna la main dans le vide. La caravane commença à tourner sur elle-même et revenir sur ses pas. Michel écarta les bras. Deux grandes ailes blanches s’étalèrent. La lumière du soleil se réfléchit dans le premier mouvement d’ailes avant qu’elles ne se replient délicatement derrière elle.
- Tu es double Milena. Un vrai talent pour la dissimulation. Double…
Michel la fixa de bas en haut, décrivant des yeux, les courbes de son anatomie.
- Une si belle duplicité…

L’archange s’approcha de la jeune femme. Elles étaient si proches que leurs deux corps semblaient se répondre. Michel lui susurrait des mots à l’oreille. Personne n’entendit ce qu’elle venait de lui dire. Pourtant tous frémirent en découvrant le visage se défaisant de la jeune femme.
- tu es surprenante Milena, vraiment surprenante …
La lame de l’être ailée lui traversa la poitrine.
- … Mais je n’aime pas les surprises.
Le corps de Milena sursauta.
- Michel, tu avais … promis… promis de me libérer si j’apportais …
Le visage de l’archange s’anima un instant.
- Les ordres changent ma belle amie, les ordres changent et avec eux, conséquences et nécessités. Et tu n’es plus nécessaire. Crois bien que je saurais garder vivant en moi tous nos instants.
Dernier sursaut d’orgueil. Tâchée de son propre sang, la main gauche de Milena glissa le long de l’épaule de l’archange et la griffa à la base du cou. Un filet de sang perla avant que la blessure ne se referme d’elle-même.
- Soit maudite, archange versatile. Je coule en toi. il me sentira et saura ta vérité.
Le corps de la belle demoiselle glissa dans les bras de l’archange. Délicatement, elle s’en saisit et le porta comme une princesse, ses bras gisants, ouvrant à la vue de tous, la blessure fatale.
- Tu étais certainement trop belle pour vivre longtemps. Une si belle créature qui trahit pour nous, nous aurait trahi en retour. La beauté revêt trop de risques.
L’archange se tourna vers les siens. Les bédouins, en retrait, ne comprirent que trop tard ce qui venait de se passer. Cette femme… cet homme… Cette être ailée devant eux renvoyait tant de rage et de souffrance. Aucun n’avait su bouger et tenter de s’interposer. Michel les regarda tous, immobiles auprès de leurs bêtes fidèles.
- Admirez et soyez fiers de son dévouement. Elle me fut fidèle jusqu’au bout, tout comme vous saviez lui être fidèles. Et face à tant de dévouement, la seule vraie récompense est d’offrir une mort glorieuse

Michel tourna les yeux vers son second. Craquement de chair. Les douze hommes de main déployèrent à leur tour ailes blanches et lames étincelantes. Dans un battement d’ailes, ils s’élevèrent et s’abattirent sur la caravane. Dans un cri de résistance, les bédouins dégainèrent dagues et autres sabres traditionnels. La rage retrouvée de ceux qui venaient d’accepter leur sort. La clameur du métal s’entrechoquant résonna quelques instants dans les hurlements de guerre.
Et le silence reprit pouvoir sur les dunes. Dans une dernière étreinte, le sable recouvrait peu à peu les faces et les corps déchirés, sans vie, des fils du désert.

Plus loin, les anges se posèrent au pied de la pyramide. L’entrée était ouverte, la pierre avait été roulé sur le côté. Michel et les siens s’engouffrèrent sans attendre dans le boyau souterrain. Les couloirs s’élargissaient à chaque pas. Rapidement, ils aboutirent dans une salle en longueur, peuplé de part et d’autre de six colonnes formant une traverse vers un large siège de roche blanche. La sobriété des lieux n’avait rien de commun avec l’art traditionnel des peuplades locales. La pierre froide et naturelle régnait en maîtresse absolue. Seule exception à ce dictat, un cartouche ornait chacune des douze colonnes. Michel remontait la salle, lisant l’une après l’autre, les inscriptions. Il s’approcha de lui d’elle et posa la main délicatement sur la marque gravée.
- désolé, Belle Demoiselle…
-
Un hurlement. Un grognement. L’écho rebondit sur les parois minérales. Michel éleva la voix.
- Isaïe ! Ezéchiel !
Les deux anges se précipitèrent dans le couloir sombre. Un long silence accompagna Michel vers le large siège. Un autre hurlement déchira la pierre. Des pas hésitants résonnaient dans le couloir. Ezéchiel, chancelant, le torse en sang, réapparut.
- Seigneur Archange… Fuyez !
Revenir en haut Aller en bas
https://songes-du-crepuscule.1fr1.net/
Aytan
Rêveur d'arbres et d'étoiles
Aytan


Nombre de messages : 773
Age : 38
Date d'inscription : 26/12/2005

Textes de Juin Empty
MessageSujet: Re: Textes de Juin   Textes de Juin EmptyMar 26 Juin 2007 - 9:59

Texte 3




Une plaine noyée par la brume. Une route que l'on devine, que l'on suit jusqu'à ce qu'on puisse voir un trône d'onyx, flanqué d'un arbre intensément noir.
Un arbre au pied duquel repose la Mère, et un trône sur lequel siège le Père.
- Seigneur, votre enfant est entré dans la Pyramide, de son plein gré.
- Je le sais Milena, je le sais. Tous le savent d'ailleurs. Démoniaques, Angélus, Apostats, Enfants de Gaïa… Tous préparent la guerre alors que nul ne sait ce que David va faire. Bientôt, les lieutenants vont combattre alors que leurs généraux les abandonneront…
- Quels sont vos ordres, demanda la lycane, masquant son trouble.
C'était en effet la première fois qu'elle entendait son maître Imzzelgom appeler l'Hybride par son prénom. Etait-ce un mauvais augure ? S'était-il attaché au jeune homme malgré lui ? Se pouvait-il que son esprit se soit entaché de sentiments trop humains ? Et qu'était donc cette phrase, cet abandon, quelle sorte de prophétie se cachait derrière ces mots ?
- Nous irons le voir. Oui, c'est ce qu'il y a de mieux à faire. Il sortira bientôt de la Pyramide. Il ira trouver ceux qui peuvent le comprendre. Peut-être suis-je de ceux-là. Toi aussi Milena, sûrement.
Descendant de son trône, Imzzelgom alla se recueillir devant l'arbre sous lequel était enterrée la mère de David.
Se détournant du spectacle pitoyable que lui offrait le chef des Apostats, Milena étouffa un cri de colère. Elle pouvait le jurer, ce que faisait Imzzelgom n'était pas une réaction digne de lui, de celui qui avait défié le Divin puis Samaël... Ce n'était pas une réaction digne de celui qui avait été appelé la Bête du Gévaudan par les Français, ou Fenrir, le Loup de Ragnarok par les Scandinaves.
Milena courut dans la brume. Oh oui, elle aussi allait voir David.

***


- Le centre de la Toile ? Je pensais qu'une infinité de possibles existaient en même temps, comment pourrais-je être le centre de tant de mondes ? Il y en a forcément où je n'existe pas !
La voix et les lumières qui baignaient David depuis son entrée dans la Pyramide s'estompaient de plus en plus. A travers les halos bleutés, la pierre grise commençait à apparaître, à travers les murmures de la Connaissance, le souffle de Chamsin charriant le sable du désert se faisait entendre.
- Attendez, ne partez pas, pas encore. J'ai encore tant de questions !
Sur la peau du Premier-Né, un duvet noir apparaissait, prémices d'une transformation imminente. Alors que David se mettait en colère, son loup intérieur commençait à se manifester.
Le jeune homme s'assit sur la pierre froide. Ses pensées s'entrechoquaient sans cesse dans son esprit, les mêmes mots tournaient inlassablement. Pourquoi Hybride, pourquoi Premier-Né ?
A peine s'était-il posé ces questions que l'image d'un gigantesque loup noir apparut dans son esprit. L'espace d'un instant, David crut se contempler dans un miroir, il s'agissait d'un lycan à coup sûr, sa démarche, son apparence. Imzzelgom. L'image fut vite remplacée par d'autres, une femme belle et fragile, le loup qui la prend en chasse, la poursuit et la fait sienne. Un enfant, David, le loup attaqué, la mère déposant un couffin devant un manoir, Vitry.
"Est-ce cela l'Omniscience, se demanda David, est-ce ainsi ?"

***


- Manipuler cette créature ? Pour l'amener à servir nos desseins ? Ne pensez-vous pas qu'il soit trop tard pour ça ?
La voix du Maître était emplie de désillusions. La salle taillée de roc blanc dans laquelle la réunion se tenait, accueillit ces questions comme le glas funeste d'une église.
- Que voulez-vous dire ?
- Il connaît Gabriel, et maintenant il nous connaît nous. Il va pressentir chacune de nos actions. Vous voulez peut-être lui tendre la main et lui dire : "Regarde là-bas, réduit à néant les mondes où Samaël triomphe. Comment ça un de nos Archanges a voulu t'éliminer ? Mais non !" Vous ne pourrez jamais le manipuler car nous sommes déjà des ennemis pour lui.
- Et lorsque ses capacités seront à leur apogée, il sera capable de prédire parfaitement chacune de nos actions, même si nous nous en remettions au hasard pour prendre nos décisions, surenchérit un autre membre du conseil.
- Que préconisez-vous alors, demanda la voix d'un autre Maître dans laquelle la colère était à peine dissimulée.

Plus haut dans les gradins, un être au visage et aux yeux emplis de tristesse se leva.
- Où vas-tu Uriel, demanda un chérubin. Le conseil n'est pas terminé et tu n'as pas reçu tes ordres.
- Peu importe, lâcha l'Archange, mélancolique. A partir de maintenant, je renie le Conseil.
- Mais enfin, tu es la Flamme de Dieu ! Tu ne peux pas partir comme cela, tu risques la Déchéance !
De plus en plus de créatures angéliques se retournaient, désireuses de connaître l'origine du trouble.
- C'est justement parce que je suis la Flamme de Dieu que je pars. Cette caricature d'assemblée n'est pas le Divin et je ne veux recevoir d'ordres que de lui, comme autrefois. Où est-Il justement en ce moment critique, alors que nous le réclamons à corps et à cris. L'Hybride sera bientôt le Divin, il en aura le pouvoir. Je pars à sa rencontre, je dois le voir.
- Et je viens avec toi, dit un autre être en se levant, les ailes déployées.
- Michaël, s'étonna le chérubin, toi aussi ? Mais comment repousserons-nous les Dragons de l'Ennemi si tu n'es pas là ? Maîtres !
Mais il était trop tard. Uriel avait quitté la salle, Michaël était sur le seuil.
- Tu ne connais pas Samaël, notre frère. Lui aussi ira auprès du Rejeton. Comme les autres Archanges qui se lèvent déjà là-bas, Selaphiel, Gabriel, et aussi tous ceux dont les noms ont été bannis.

***


- Les Maîtres des Angélus se sont piégés eux-mêmes en faisant attaquer le fils d'Imzzelgom. Prendront-ils le risque de lancer un nouvel assaut ?
- Réveillons les six cent soixante-six légions, Maître Samaël !
Pendant quelques instants, Samaël l'Accusateur releva la tête. Il avait fait mander les Princes de son Royaume pour un conseil extraordinaire, mais ils ne lui étaient en réalité d'aucun secours. La grande majorité voulait en découdre avec les Apostats et les Angélus tant que David n'était pas pleinement conscient de ce qu'il était. Les autres, trop peu nombreux, partageaient l'hésitation du Seigneur de ces terres...
- Oui, Béhémoth, fais donc cela...
Devant le regard médusé de ses lieutenants, Samaël se leva de son siège et quitta la réunion.
"Je ne sais pas comment cela va se terminer, je ne suis pas David. Mais il me reste une seule option. Aller à la rencontre de ce Premier-Né. Peut-être m'écoutera-t-il et comprendra-t-il ce que je voulais avant la Déchéance, ce que je veux encore aujourd'hui... Mes frères restés dans la Lumière, arriverez-vous à enlever le carcan que vous ont posé les Maîtres ? Arriverons-nous à nous retrouver comme autrefois ? David pourra-t-il enfin réussir à ouvrir les yeux, alors que moi j'ai échoué ? Tant de choses reposent sur ce jeune homme si frêle..."

***


Une quinte de toux déchira les poumons et la gorge du loup. Plongé qu'il était dans la vision de son père et de sa naissance, David ne s'était pas rendu compte que sa transformation s'était poursuivie. Pris d'une soudaine faiblesse, ses pattes arrière ne le portèrent plus, et il s'écroula pantelant sur le sol.
"Je ne vais jamais sortir de là. Pourquoi n'ai je pas un ou deux humains à me mettre sous les crocs ?"
Des lumières revinrent soudain entourer le loup-garou. Mais il ne s'agissait plus du halo diffus initial, non, cette fois, David était confronté à des sortes de lucioles qui virevoltaient sans relâche autour de lui. Une grise, une rouge, une verte.
"C'est le comble pour moi qui suis cencé être omniscient de ne pas savoir à quoi j'ai affaire", pensa le loup.
Choisis !
La voix avait résonné aux oreilles du fils d'Imzzelgom à la façon de la première vision, laissant David stupéfié.
"Est-ce toi, David le lépreux, David le spectre qui revient me hanter, toi qui est moi, toi la partie que je refoulais jusque là ?"
Choisis ! Choisis bien!
Les yeux jaunes du loup suivirent quelques minutes le ballet incessant des feux follets. Le gris de la neutralité, le rouge de la passion, le vert de l'espoir... Ou le gris du vide, le rouge de la guerre, le vert du poison ? Le gris de la chambre de Vitry, le rouge du sang que crachait le malade, le vert des forêts qu'il désirait dans ses rêves ?
Un rictus vint déformer la face de David, les babines se retroussèrent sur ses crocs. David souriait.
Il ferma les yeux et laissa le hasard décider de son sort. Il ouvrit la gueule et avala une des lumières...

***


Une odeur forte d'humus vint agresser l'odorat surdéveloppé du loup-garou. A tel point qu'il fut tiré de son inconscience. David garda les yeux fermés... Il ne se trouvait plus dans la Pyramide.
Il était toujours sur le flanc. Il sentait le vent agiter son pelage, et charrier mille odeurs jusqu'à sa truffe humide.
La terre, l'eau, la peur, l'agressivité, la soumission. Le loup. Son odeur propre ? Le sang, l'os broyé. Du sang qui se répandait sur la terre ! S'agissait-il du sien ? La peinture olfactive qui se dessinait dans son esprit était encore trop incomplète aux yeux du lycan.
Il ouvrit les yeux.
Autour de lui, plusieurs grands loups gris étaient assis et le contemplaient. Devant David, un élan avait été déposé. La face de l'animal était tournée vers le lycan qui pouvait ainsi voir que le cervidé était toujours vivant, ses yeux implorant une mise à mort rapide. Le loup noir se releva tant bien que mal. Les flancs de l'herbivore était déchiquetés, les loups avaient dû lui sauter dessus pour le mettre à terre. Ignorant les regards de la meute, le garou trancha la jugulaire et laissa le sang inonder son museau. Pendant de longues minutes il mastiqua la chair en un réflexe plus humain qu'animal, jusqu'à ce qu'un des loups, plus vieux et plus grand encore que les autres ne se lève et s'approche.
- David. Pas nom de loup. Pas nom de garou.
L'animal ponctua sa déclaration d'un grognement rauque.
- Qui êtes-vous, où sommes-nous ?
- Dominant t'expliquer. Viens.
A ces mots, la meute rompit son cercle et partit vers le nord. Arrachant un dernier lambeau de viande, David suivit les loups. Il n'avait jusque là que peu marché sous sa forme animale mais les allures lui vinrent naturellement, comme si elles avaient toujours fait partie de lui. Le pas, le trot, puis le galop à travers les arbres.
Autour du lycan, de gigantesques conifères montaient à l'assaut du ciel, baignés par un soleil qui allait sur son couchant. Des senteurs inconnues venaient enivrer ses sens : la résine qui coulait des arbres, les élans qui étaient passés plus tôt, les odeurs des membres de la meute, celle des mâles comme des femelles. David reconnut instinctivement les plus hauts dans la hiérarchie, les plus vieux et les plus jeunes, les femelles gravides. Et par-dessus tout, David reconnut une odeur, certes légères, mais néanmoins présentes d'humains.
La troupe constituée d'une vingtaine d'individus déboucha bientôt dans une plaine. Par endroits, subsistaient quelques plaques de neige que le soleil n'avait pas réussi à faire disparaître. Au loin, une harde s'ébroua, partant vers l'ouest. La vision des cerfs et biches galopant raviva une faim intense dans l'estomac de David, saupoudré d'un besoin de chasser qu'il ne contint qu'à grand peine. Le loup noir décida alors de se concentrer sur ses congénères… Qui étaient-ils vraiment ? A l'odeur, il semblait que tous soient des lycans… Etait-ce une bonne chose ? En tout cas, ils avaient chassé pour lui… Son arrivée était-elle prévue, ou était-il resté inconscient plusieurs jours ? Et où se trouvait-il ? Au paysage, David penchait pour l'Europe Centrale. Il s'attendait à tout moment à voir surgir un château-fort à l'horizon.

La course dura encore jusqu'à ce que le soleil touche le bord du monde. Le loup noir commençait à fatiguer, et sa vitesse s'était sensiblement ralentie. Il avait voulu se remettre au trot une fois mais un mâle avait alors fait mine de lui mordre les jarrets. David n'avait pas demandé son reste et avait repris sa place et son allure. Enfin, la meute arriva près d'une caverne. Le terme n'était pas le mieux choisi. Il s'agissait d'une sorte de tunnel qui s'enfonçait à l'intérieur d'une colline. Un boyau sombre et peu accueillant. Devant, dans la lumière d'un feu, un vieil Indien attendait.
- Lui Dominant, lâcha le même loup qui avait parlé à David la première fois.
La meute se répartit dans la zone, certains se couchant dans la lumière, d'autres repartant en vadrouille. David regarda autour de lui. Il sentait que tous les loups attendaient qu'il avance. Il marcha donc jusqu'à l'homme.
- Sois le bienvenu, David, Fils d'Imzzelgom, commença l'Indien.
- Vous connaissez bien des choses sur moi, répondit David en se mettant sur son arrière-train.
L'homme se fendit d'un sourire, et se mettant debout, s'étira de tout son long, comme après une longue attente.
- Te voici au Canada, David. Bienvenue chez les Wendigos ! Loin des Angélus, des Démoniaques et des Apostats, pour l'instant en tout cas. Te voici chez les Enfants de Gaïa !
Revenir en haut Aller en bas
https://songes-du-crepuscule.1fr1.net/
Aytan
Rêveur d'arbres et d'étoiles
Aytan


Nombre de messages : 773
Age : 38
Date d'inscription : 26/12/2005

Textes de Juin Empty
MessageSujet: Re: Textes de Juin   Textes de Juin EmptyMar 26 Juin 2007 - 19:05

Texte 4


Un nouveau réveil. Sans douleur cette fois, mais si confus. Un nouveau réveil mâtiné d’ocre, d’incarnat et d’ébène. Que se passait-il ? David tenta de se concentrer : il ne vit plus qu’une tache noire sur un rond jaune. Un œil ! Crâne, inquisiteur, il appartenait à un animal… un corbeau.
- Où suis-je ? Demanda l’Apostat.
« Ta question n’a pas de réponse qui puisse te satisfaire. Tu es dans un plan n’appartenant ni à ta réalité, ni au domaine du rêve. »
Etait-ce le corvidé ? David n’aurait su dire d’où provenait la voix. Tout semblait si étrange ; le rouge dominait tout autour sans qu’on puisse distinguer le contour d’objets, du ciel ou du sol.
Seul le corbeau semblait réel, comme incrusté dans une peinture impressionniste. David prit soudain conscience qu’il n’avait pas de corps. Il s’affola quand un rire narquois retint son attention.
- Eh bien ! Les rôles sont inversés : te voilà spectre et je suis l’humain.
David reconnut sans mal le ton du Spectre mais celui-ci avait une consistance toute nouvelle : il se pavanait dans un costume noir et chapeau haut de forme, brandissant prétentieusement une canne dorée. David ouvrit la bouche mais le Spectre l’arrêta d’un geste désinvolte et déclama :
- Bienvenu à la maison ! Allons : ne faisons pas attendre notre guide emplumé. Et ne t’inquiète pas pour le petit voyage : je me charge de tout, mon ami.
Avant qu’il n’ait pu formuler une réponse, David se sentit happé, dirigé comme un enfant au milieu d’une foule en furie. Un faisceau multicolore l’enroba un instant. La sensation, plutôt désagréable, ne dura pourtant pas.
- Cette fois, nous y sommes, fanfaronna le Spectre visiblement ravi.
Un palais, dont la teinte s’apparentait au granite, se dressait au milieu du néant, immense et irréel. On pouvait tenter de suivre ses toits, ses colonnes, ses tourelles mais il était impossible de l’embrasser dans son entier d’un regard. Il disparaissait par endroit dans une brume noire.
Puis, à l’attention de David :
- Allons, fais un effort : matérialise-toi. Prends exemple sur moi, susurra le Spectre en écartant les bras. C’est extrêmement mal poli de rester ainsi désincarné. Notre hôte mérite mieux que cela…
David ne releva pas l’ironie de cette phrase, lui le Spectre qui était toujours apparu, jusqu’à aujourd’hui, sous forme éthérée. Il tenta plutôt de suivre le conseil sans trop savoir comment y parvenir. Il laissa son instinct opérer…
Il ne s’agissait pas de se matérialiser comme l’avait suggéré le Spectre mais plutôt de projeter une image. Répondant à une pulsion animale, David prit bientôt la forme d’un loup. Le Spectre opinait de la tête manifestement satisfait tandis que les portes du palais glissaient sur le marbre sombre. David et le Spectre, le Spectre et David firent quelques pas hésitants. Ils atteignirent rapidement un vaste hall épuré où trônait une ombre humanoïde massive.
- Mon fils… Enfin ! tonna une voix grave.

*
* *

Dans la cité blanche, un silence pesant s’était abattu. David avait fait son choix : pénétrer dans la pyramide.
Gabriel considéra l’assemblée des anges. Tous les chœurs étaient réunis, hormis les Maîtres Séraphins. Les visages graves en disaient long sur l’inquiétude et la déception provoquées par la nouvelle. L’Archange Raphaël s’approchant semblait contrarié :
- Va Gabriel ! Retourne voir tes Maîtres et sors nos semblables de leur léthargie. Le temps joue contre nous maintenant.
Une voix les interrompit :
- Raphaël ! Ton ardeur t’honore.
Dans un bruissement d’ailes et d’acier, Melatron et l’ensemble du chœur Séraphins fendaient les rangs à la rencontre des autres anges. Gabriel se sentit soulagé. Depuis trop longtemps, il portait seul son fardeau. Il avait été le premier à percer la perfidie des plans d’Imzzelgom avant même la naissance de son bâtard. Par la suite, les Maîtres lui avaient naturellement confié la tâche de retrouver l’enfant, de l’enlever ou de le détruire. Mais la noire engeance avait pris soin de brouiller les pistes et finalement, l’alrune Milena avait retrouvé David avant lui. Aujourd’hui, il était vain de tenter de retrouver le bâtard. Il fallait se préparer à l’inéluctable : la guerre qui allait avoir lieu.
Les Maîtres Séraphins présents, le concile céleste était au complet. Une onde parcourut l’assistance, des centaines d’ailes blanches s’agitèrent, la lumière sembla redoubler d’intensité. L’Archange recteur des Séraphins reprit la parole :
- Membres célestes, vous êtes tous au fait des derniers évènements qui se déroulent sur Terre. Une nouvelle menace se profile aux enfers, inconnue jusqu’alors. Imzzelgom a réussi l’impensable : engendrer et élever un démon sur Terre. Il espère grâce à lui rouvrir les Neuf Portes des Enfers. Gabriel a vaillamment tenté de ramener dans le droit chemin ce David, bâtard d’Imzzelgom, car il a senti en lui une part d’humanité. Toutefois, la pernicieuse Milena, suppôt du Démoniaque, a contré ses efforts. Il nous faut dorénavant combler notre retard. L’heure n’est plus à la conversion du bâtard mais à la protection des Neuf Portes. Revêtez vos armures ! Brandissez vos glaives ! A chaque chœur, une porte et que la lumière triomphe.
Comme les autres, Gabriel acclama ce discours. Pourtant, une part de lui-même posait la question. Celle ayant détourné tant de ses semblables et tant d’humains du droit chemin. Pourquoi le Divin n’intervenait-il pas ?
Melatron le tira de ses pensées :
- Gabriel. Ta charge est encore grande. Tu ne dois plus échouer. Gabriel, cette sombre besogne est tienne…
L’Ange Gabriel se leva alors, une lance à la main.

*
* *

Milena avait quitté la Terre pour un monde transitoire nommé Stonelink.
Ici, les Enfers avaient apposé leur empreinte sur une civilisation humaine moyenâgeuse. Survolant en spirale à dos de dragon la citadelle de Narkadur, elle finit par se poser dans la cour intérieure.
Un comité comptant une centaine de guerriers humains l’attendait. Leur chef, un molosse de plus de deux mètres, vint s’agenouiller devant elle :
- Les troupes sont en place, Maîtresse. Nous attendons votre signal.
- Bien. Les trompes ne tarderont plus à présent et vous n’aurez pas besoin de moi pour les entendre. Mes quartiers sont-ils prêts ?
- Oui, Maîtresse.
Elle hésita un moment à inviter ce guerrier musculeux à rejoindre sa couche. Cela faisait bien longtemps qu’elle ne s’était pas adonnée aux plaisirs de la chair. Pourtant, elle y renonça : le temps n’était pas encore au repos.
Gravissant les escaliers de sa tour, elle imagina les évènements qui devaient secouer les Enfers à cette heure. Imzzelgom avait dû réunir l’ensemble de ses sympathisants, leur présenter son bâtard comme l’arme ultime pour rouvrir les Neufs Portes. Nul doute que les ennemis d’autre fois avaient rallié sa cause : Samaël allait devoir accepter Imzzelgom comme l’unique Prince des Ténèbres.
Milena entra dans ses appartements, et approuva la présence de son armure aux couleurs feu et macassar. Enfin seule, elle se déshabilla entièrement. Ainsi nue et désarmée, elle revêtit la forme qu’elle affectionnait : humanoïde féminine, dotée de sabots, de cornes, et d’ailes membraneuses. De la fenêtre, elle observa le bataillon d’humains. Bientôt, à ceux-ci viendraient se joindre les légions démoniaques. Jamais la victoire n’avait été aussi proche.
Un point blanc dans le ciel attira soudain son attention. Par réflexe, elle porta la main à sa taille, cherchant une épée qui ni était plus car gisant sur le sol à quelques mètres. Elle bondit en arrière afin de s’écarter de l’ouverture, une seconde trop tard. Une flèche brisant un carreau vint percer son sein droit, lui arrachant un cri de rage. Elle roula sur le sol alors que les pans de la fenêtre volaient en éclat sous l’intrusion de l’ange Gabriel. Milena ne ressentait pas la douleur de sa blessure mais se sentait faible. Faible et humiliée. L’orgueil et la vision d’une victoire assurée l’avaient aveuglée.
Elle tenta malgré tout de saisir le pommeau de son arme. Un nouveau trait lui transperça la main, la clouant au sol. Ses forces l’abandonnèrent un peu plus. Elle se savait maintenant incapable de se métamorphoser.
Gabriel délaissa son arc pour brandir sa lance :
- Puisses-tu trouver le repos, âme torturée, déclama-t-il avant de lui enfoncer la pointe dans le crâne.

*
* *
L’étreinte du père pour son fils fut une libération. Les frustrations, les souffrances, la solitude se consumèrent dans la flamme ardente d’une colère nouvelle. David comprenait dorénavant. Dieu les avaient reniés, chassés de la Terre : déchus. Pourtant, l’Apostat avait en lui la puissance de regagner la Terre et d’y introduire les légions infernales. Il fallait ouvrir les Neuf Portes.
Imzzelgom relâcha son fils, le Spectre avait disparu. Cependant David ne parut pas surprit, il n’avait plus besoin de cette béquille.
Dresser sur ses jambes arrières, l’Apostat n’était plus un loup ni un humain mais un être hybride terrifiant. Il hurla sa renaissance. Imzzelgom exulta.
Pourtant au fin fond de l’âme de David, une parcelle d’humanité demeurait, pleurant le passé et le futur.
Revenir en haut Aller en bas
https://songes-du-crepuscule.1fr1.net/
Contenu sponsorisé





Textes de Juin Empty
MessageSujet: Re: Textes de Juin   Textes de Juin Empty

Revenir en haut Aller en bas
 
Textes de Juin
Revenir en haut 
Page 1 sur 1
 Sujets similaires
-
» Textes de Mai en Lice
» Les textes de l'AT 12
» Textes de Juillet
» Textes de l'AT6 : Et si ...
» Textes d'aout

Permission de ce forum:Vous ne pouvez pas répondre aux sujets dans ce forum
Les Songes du Crépuscule :: Les Songes à travers le monde :: Projet Lycan-
Sauter vers:  
Ne ratez plus aucun deal !
Abonnez-vous pour recevoir par notification une sélection des meilleurs deals chaque jour.
IgnorerAutoriser