L'auteur : Ursula K. Le Guin (Etats-Unis)
L'histoire :
Comme tous les romans de science-fiction d'Ursula Le Guin, c'est très difficile à résumer, parce que l'intérêt du livre réside, peut-être plus que dans l'histoire au sens strict, dans le monde qu'elle invente.
Dans le futur, Genly Ai, un Terrien, est envoyé sur la planète Gethen (alias Nivôse) pour tenter de convaincre ses gouvernements d'adhérer à l'organisation interplanétaire qui réunit différents systèmes stellaires autour d'échanges commerciaux. Seulement les conditions climatiques de Nivôse sont très difficiles, et la situation politique est tendue ; les gouvernements ne semblant pas très motivés pour l'adhésion à l'organisation des planètes unies.Mais on est ici loin de Star Trek : les voyages spatiaux durent des années et c'est une immersion culturelle totale que connaissent les envoyés.
Genly se trouve alors immergé dans une société très étrange. Ici, les humains ont connu une évolution génétique sensiblement différente : ils ne sont ni homme ni femme, mais un peu des deux. Toute la société prend évidement en compte cette absence de différence sexuelle et fonctionne différemment de la nôtre. Mais on est loin du mythe des Amazones ou d'un monde idyllique sans guerre, hein. Ursula Le Guin imagine toujours des civilisations de façon complète et subtile ; l'absence de genre n'est pas le seul élément de cette société, c'est un monde beaucoup plus complexe que seulement un "tiens, comment ce serait s'il n'y avait pas de différences entre des hommes et des femmes ?". Le décompte du temps, le système politique, les relations familiales sont différents. Les conceptions des choses elles-mêmes le sont.
Genly a du mal à comprendre cette civilisation, et surtout à s'habituer à ce que ses interlocuteurs soient à la fois des "il" et des "elles". En contrepartie, lui, bloqué à leurs yeux dans une phase hormonale qui le maintient du côté masculin de son organisme, passe aussi pour un monstre.
Mais sa mission l'entraîne dans une traversée du pays dans des conditions très difficiles, poursuivi par un gouvernement qui le voit comme un danger.
Voilà pour l'histoire, à peu près. Je l'ai lu il y a longtemps et mon résumé n'est pas génial, mais celui de Wikipedia est carrément nul.
C'est un livre vachement intéressant. Comme toujours dans les romans d'Ursula Le Guin, le monde est très travaillé, très cohérent, et l'évolution de la perception de ce monde par le héros est subtile et toute en nuances. On suit l'histoire à la fois par les yeux de Genly - puisque c'est son rapport qu'on lit - et par ceux d'Estraven, l'autochtone qui l'accompagne et dont on a des extraits de son journal. La relation entre les deux personnage est vraiment intéressante, avec cette progression de la compréhension, cette acceptation de la différence, cette proximité à cause des aléas de leur voyage. Et je trouve le personnage d'Estraven bien travaillé, calme, dévoué à ses convictions, humain, mais différent.
La longue traversée du glacier est totalement dépaysante. On s'y sent. Ce livre et
A la Croisée des Mondes sont les deux ouvrages qui m'ont donné envie de découvrir le Grand Nord (même si c'est plus agréable pour Lyra que pour Genly, parce que c'est une véritable épreuve physique).
Je sais que certains trouvent le style d'Ursula Le Guin trop froid ; personnellement, je le trouve simplement bien écrit. J'aime bien le fait qu'on suivre l'histoire à travers un rapport de mission et un journal intime : certains détails qui ne collent pas laissent à penser qu'il s'est passé autre chose, qui ne nous a pas été raconté. Bizarrement, ça rend le tout plus vivant.
C'est vraiment un livre qui m'a marquée et auquel je repense souvent
Je crois que c'est mon préféré d'Ursula Le Guin, avec
Le Nom du monde est forêt.
En plus, j'aime bien le titre, même si je ne me souviens plus de sa signification, lol. (Ça a un rapport avec un proverbe de Gethen).